Réparation d'une paire d'enceintes de PC

Introduction

Dans ce tutorial, nous allons tenter de réparer des enceintes pour ordinateur. Le modèle concerné est "Creative Cambridge Soundworks Slim 500" datant des années 2000. Le son est de bonne qualité, assez puissant et parfait pour écouter de la musique et des films. Mais depuis des mois, le son de mon équipement n'est plus stabilisé : il varie aléatoirement, souvent quand il commence à faire chaud, et l'écoute est devenue insupportable. La cause n'est pas logicielle sur le PC avec les régulateurs de volume intégrés.

Ce système audio dont nous voulons prolonger la vie est composé de plusieurs éléments :

  • Un caisson de basses incluant toute l'électronique simple en surface,
  • Deux satellites pour la gauche et la droite,
  • Une arrivée électrique,
  • Une arrivée jack audio standard,
  • Une prise de commande déportée pour le volume et l'arrêt électrique.

Le régulateur de tension

La variation instable du volume fait immédiatement penser à l'amplitude du signal, c'est-à-dire à la tension. Dans la mesure où quasiment tous mes appareils tombent en panne après leur chargeur, j'ai souhaité d'abord me concentrer sur le boîtier d'alimentation.

Celui-ci est défini en 13,5 V. Il est lourd, car il intègre un bloc en ferrite. Cela ne se fait plus trop de nos jours, car les alimentations à découpage avec des transistors coûtent bien moins cher même si leur qualité est plus que variable (source). Le boîtier est fermé par 4 vis mais ces cons ont collé le plastique. Pour l'ouvrir, il faudrait y aller à la dremel. À ce stade, j'ai souhaité procéder à une analyse non destructive.

Suite à une vidéo de Deus Ex-Silicium, un youtuber sur l'électronique, j'ai pensé à utiliser un convertisseur buck step-down à base d'un LM2596. J'ai constaté que l'alimentation délivre dans les alentours de 16 V voire plus, ce qui est supérieur à la tension indiquée sur le boîtier. Alors en abaissant la tension (d'au minimum 1,5 V), peut-être cela va-t-il "désaturer" le son dans le circuit aval ? Il me faut du fil, des jacks et une carte électronique de ce type. Conseil : préférez un modèle sans soudure et sans voltmètre intégré (pas trouvé). Le montage est celui-ci :

Convertisseur buck step-down LM2596 monté avec du fil

En mettant ce circuit en série entre l'alimentation et le caisson de basses, on délivre du 13,5 V stabilisé ! Les différents datasheets du LM2596 semblent indiquer que la tension s'adapte très rapidement aux changements de tension. Malheureusement, le retour de la chaleur de l'été continue de faire déconner le système d'enceintes.

Cet investissement n'est pas perdu, car le circuit peut être recyclé pour d'autres usages. J'ai même préparé un boîtier imprimable en 3D, c'est dire que j'y croyais. Le fichier STL est disponible au téléchargement mais cela coûte 30 € à faire imprimer.

Le transistor de puissance

L'échec de la précédente solution m'a invité à imaginer ensuite un défaut dans le transistor de puissance. En effet, c'est un composant qui chauffe beaucoup et qui est en charge de la génération des tensions dans la circuiterie avale. Aucun autre composant passif ne semble impacté par un problème (glonflement, traces noires, odeur...).

Le modèle du transistor est un TDA8510J de chez Philips Electronics, devenu NXP en 2006. Je l'ai acheté sur AliExpress auprès d'un vendeur bien évalué et la livraison a pris 3 bonnes semaines. Le datasheet est intéressant, car on y lit les limites de tension. Le transistor accepte de 6 à 18 V mais 15 V sont normalement attendus. Cela veut dire que l'alimentation externe ne doit pas délivrer plus de 18 V alors qu'actuellement elle frôle les 17,7 V. Autrement dit, mon circuit de régulation précédent était inutile, car les tolérances sont respectées. Sachant plus tard que pomper du courant sur une alimentation non stabilisée fait chuter sa tension, on ne risquait pas de dépasser cette limite.

Composant électronique TDA8510J

Bref, nous démontons le caisson et cassons le potentiomètre de réglage du volume des basses... Oh la boulette ! Il fallait juste utiliser un tournevis pour ôter le bouchon et dévisser la douille qui bloquait tout.

Pour désouder le composant de puissance, on lui coupe ses pattes qu'on retire une à une, puis on installe le nouveau composant d'une manière astucieuse. Afin que le contact soit maximal avec le radiateur, on applique une noisette de pâte thermique pour processeur de PC, on visse le composant sur son support et ce n'est qu'après être bien positionné qu'on soude chaque patte en ordre dispersé. Le datasheet explique la procédure de soudure en page 14 : on a 5 secondes à 400°C en résumé. Il n'y a même pas besoin de couper les pattes qui dépassent, puis on vérifie qu'il n'y a pas de court-circuit.

Montage d'un composant

Soudure d'un composant

Lors du remontage, on doit réinstaller un potentiomètre linéaire 50 kΩ à l'aide de fils, car nous n'avons pas le bon composant sous la main. On en a trouvé un moche de 47 kΩ en attendant. Pour savoir si le potentiomètre d'origine est linéaire ou logarithmique, il suffit de faire varier sa position et d'observer au multimètre les variations correspondantes de la résistance.

Enceintes avec potentiomètre externe

On remonte tout et le son fonctionne. Malgré tout, au bout d'un moment, le son continue de varier. C'est triste...

Le pont redresseur de tension

Profitant d'être avec quelqu'un qui a du matériel, nous décidons d'ouvrir le boîtier d'alimentation à la dremel. Cette opération avait été confirmée par le magasin d'électronique où je vais de temps en temps. Une fois découpé, le boîter restera remontable si on n'altère pas la visserie. Seulement dremeler du plastique, ça chauffe, ça fond, ça pue la mort et c'est dangereux. Ce fut nécessaire dans les coins où la scie à métaux ne passe pas à cause des fils électriques extérieurs. Cette entrave à la réparabilité ressemble à une tentative de s'éviter un procès au cas où un débile se dise « tiens et si je l'ouvrais pour y mettre mes doigts » ?

Découpe d'une alimentation à la dremel

Bref, horreur : l'alimentation n'est pas stabilisée. C'est un simple pont redresseur avec un condensateur de lissage de 3300 μF emballé dans une chaussette thermoplastique. J'ai alors supposé que les paramètres étaient calculés pour rester dans les tolérances du transistor de puissance présent dans le caisson. Seulement, pourquoi afficher 13,5 V sur l'étiquette ? Et pourquoi mon multimètre n'a cessé pendant des mois d'afficher une tension inéluctablement croissante ? Ça me perturbe depuis le début de l'histoire : on aurait évidemment dû commencer par là mais je n'avais pas le bon matériel à ma disposition.

Il nous faut nous réintéresser à ce type de vieux circuit électronique pour calculer ce qui va bien. Une vidéo YouTube nous explique le schéma même si elle manque volontiers de synthèse.

Le principe général est connu : un bobinage va isoler et abaisser une tension alternative de 220 V vers une tension plus basse fixe (Veff) qui est fonction du nombre de tours de fils, un pont de 4 diodes 1N5401 va redresser le signal pour qu'il n'oscille qu'en positif et un condensateur va lisser les oscillations pour que la tension résultante soit à peu près constante.

Simulation d'un pont redresseur

Le transformateur AC-AC fonctionne nécessairement de manière constante, car c'est la physique de l'électro-magnétisme. Il me génère du 13.2 Veff selon le multimètre. La tension de crête s'obtient en multipliant cette valeur par racine de 2, soit 18.7 V. En raison de la loi de composition des tensions en série, il faut soustraire 2 fois la tension apparente d'activation des diodes (le datasheet donne ~0,75 V pour 0,5 A) à la tension efficace du transformateur, puis multiplier par racine de 2 pour obtenir la tension continue aux bornes du condensateur qui fonctionne en tension crète. La tension théorique est de : (13,2 - 2 * 0,75) * racine(2) = 16,6 V.

La capacité du condensateur se calcule (rubrique Condensateur de filtrage) avec C = I / (ΔU * f). On définit I sur 0.5 A, car c'est l'intensité maximale observée quand les basses sont mises à fond. f vaut 50 Hz, car on est en France. Pour la variation de tension, le constructeur a considéré 3 V de flexibilité en choisissant 3300 µF, mais en ajoutant un autre condensateur de 4700 μF dans la carte électronique, il n'y aura in fine que 1,25 V de variation à puissance maximale.

Le problème est que je mesure 17.7 V en sortie de l'alimentation avec un premier appareil, 17.4 V avec un autre et 15.7 V avec un autre encore. Ce dernier m'affichait même près de 17 V avant le changement du condensateur de filtrage. Ça me rend fou...

Tension

Tension

Le convertisseur de tension AC-DC fonctionne avec un courant de charge. J'ai noté que celui-ci est constant grâce à un petit montage en série avec des dominos :

  • 0,24 A à vide
  • 0,31 A en fonctionnement sans basse
  • 0,53 A avec les basses à fond

Multimètre en mode ampèremètre

Maintenant que nous avons tous les paramètres, il est possible de faire une simulation informatique avec le courant maximal.

Simulation Tension/Courant d'un pont redresseur

Avec une charge de 0.31 A, la tension oscille théoriquement entre 16.3 V et 17.1 V. On a voulu voir à l'oscilloscope la forme du signal mais il n'a malheureusement pas fonctionné correctement.

Bref, ça m'a saoulé : j'ai changé le condensateur de filtrage par un autre de 25 V à 3300 μF, même si a vu plus haut que l'utilisation d'un stabilisateur de tension n'avait rien changé au problème. Mon multimètre a immédiatement témoigné d'une baisse de tension significative, ce qui veut dire que le condensateur était bien à l'origine de la variation de la tension affichée. Mais on peut se questionner sur la fiabilité de mon multimètre, il commence à dater.

  • Avant :

Condensateur de filtrage dans une alimentation (avant)

  • Après :

Condensateur de filtrage dans une alimentation (après)

J'en ai profité pour réparer le potentiomètre alpha linéaire en 50 kΩ. Il est plus long que l'original, mais ça ne fait rien.

Potentiomètre alpha linéaire de 50 kΩ

On peut noter que la carte électronique inclut également un condensateur de 4700 μF. Quand bien même celui de l'alimentation serait défaillant, il y en a un second. J'ai gardé le vieux condensateur pour pouvoir mesurer sa capacité un jour si je trouve quelqu'un qui possède un capacimètre.

Conclusion

Au final, qu'a-t-on changé ?

  • Le condensateur de filtrage de l'alimentation non stabilisée : gros doutes sur lui confirmés par la mesure.
  • Le transistor de puissance : il n'y avait aucune preuve de panne.
  • Le potentiomètre du volume des basses : je l'ai cassé en démontant, ça n'est pas la cause.

Des tests en conditions réelles auront lieu prochainement pour vérifier si cette réparation est un succès. J'en doute mais ça m'a amusé.

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Dernière modification le 2 octobre 2024 à 22:14